Report sine die de l’adoption de la Recommandation CNIL

Dans un contexte de crise, la CNIL décide de reporter sine die l’adoption finale de sa recommandation sur les cookies et autres traceurs.

S’inscrivant à la suite de la consultation publique organisée début 2020 par la CNIL, la version définitive du projet de recommandation sur les modalités pratiques de recueil du consentement en matière de cookies et autres traceurs ne sera finalement pas publiée par la CNIL en avril prochain comme prévu initialement.

En effet, la CNIL a indiqué le 25 mars dernier qu’ « afin d’aborder dans un contexte plus serein ce sujet majeur pour la protection des données personnelles comme pour l’économie de l’écosystème publicitaire, la présentation du projet de recommandation est reportée à une date ultérieure, qui sera fixée en fonction de l’évolution de la situation ».

Cette décision de la CNIL a été saluée par les acteurs de la communication et du marketing digital à sa juste mesure comme étant le premier signe donné par la CNIL de la prise en compte de la situation économique de leur écosystème dans un contexte de crise sanitaire qui fragilise encore plus les éditeurs de la presse.

Enfin, il est à espérer que la publication finale de cette recommandation pourra également prendre en compte la décision du Conseil d’Etat, elle aussi repoussée, à la suite du recours le 18 septembre 2019 de neuf associations professionnelles représentatives du monde publicitaire contre les lignes directrices de la CNIL du 4 juillet 2019 relatives aux cookies.

Catherine Robin, Frédéric Saffroy et Corinne Thiérache, Associés, Carole Bui, Justine Clerc, Alice Gautron, Jeanne Quéneudec et Laura Raimondo, Avocats au sein du département Protection des données personnelles.

Modulation des cotisations sociales dues à échéance du 5 avril 2020 : Mode d’emploi

A l’heure où les premiers déçus des promesses présidentielles et ministérielles relatives au bénéfice de l’activité partielle sont priés, par l’Administration, de revoir leur copie, il ne fait pas de doute que les précisions apportées par l’URSSAF, sur les modalités de mise en œuvre de la modulation des cotisations sociales, étaient d’autant plus attendues.

C’est maintenant chose faite : les entreprises concernées peuvent en effet obtenir la modulation, voire le report, des cotisations sociales dues à échéance du 5 avril 2020.

Le dispositif de modulation des cotisations sociales proposé par l’URSSAF est-il automatique ?

Non, à la différence du report des cotisations personnelles du chef d’entreprise travailleur indépendant, l’URSSAF indique que le report des cotisations, dues au titre des salariés, suppose une action de la part du cotisant pour modifier l’ordre de paiement ou le virement bancaire.

Dès lors, quelle précaution préalable pour les entreprise ayant opté pour le prélèvement automatique auprès de l’URSSAF ?

Dans cette situation, l’Administration précise que, pour ne pas être prélevé, il convient de supprimer le prélèvement pour passer en télépaiement. (FAQ « Accompagnement des entreprises – Coronavirus », Ministère de l’Economie et des Finances, version du 25 mars 2020)

Si l’échéance à venir est rapprochée (moins de 5-6 jours), l’ordre de prélèvement est déjà parti, il convient donc de bloquer le prélèvement et de prévenir l’URSSAF, dès que possible, pour discuter d’un échelonnement.

Quelles sont les échéances de paiement des cotisations sociales concernées par le dispositif de modulation ?

A ce jour, la faculté de moduler, voire de reporter, le paiement des cotisations sociales, ne concerne que les cotisations sociales à échéance du 5 avril prochain (en principe pour les entreprises de plus de 50 salariés).

Des mesures similaires ont déjà été prises par l’URSSAF pour les cotisations sociales dont la date d’échéance intervenait le 15 mars 2020 (en principe pour les entreprises de moins de 50 salariés).

Aussi, il conviendra, le cas échéant, de réexaminer la position de l’Administration, à date, pour les échéances ultérieures.

En tout état cause, ces mesures ne constituent que des reports de cotisations sociales, et non une exonération ou une suppression desdites cotisations.

Les entreprises qui souhaitent bénéficier d’un report de cotisations sociales sont-elles tenues d’établir leur déclaration sociale nominative (DSN) ?

Oui, les entreprises sont tenues de faire leurs DSN même si elles souhaitent reporter le paiement de leurs charges.

Elles peuvent en modifier le montant du paiement pour le minorer, voire le mettre à 0, mais les DSN doivent tout de même être établies (FAQ « Accompagnement des entreprises – Coronavirus », Ministère de l’Economie et des Finances, version du 25 mars 2020).

Selon quelles modalités une entreprise peut-elle procéder à une modulation du règlement de ses cotisations sociales ?

Sous réserve de faire face à de « sérieuses difficultés de trésorerie », les employeurs peuvent moduler leur paiement à échéance du 5 avril prochain, aux conditions et modalités suivantes :

– La date de paiement de ces cotisations pourra être reportée jusqu’à 3 mois : des informations seront communiquées ultérieurement à ce sujet.

– Aucune pénalité ne sera appliquée.

– Les employeurs peuvent moduler leur paiement en fonction de leurs besoins : montant à 0, ou montant correspondant à une fraction des cotisations.

– Pour rappel, il est néanmoins impératif de déclarer et donc de transmettre la DSN dans les délais prescrits.

Quelles est la démarche pour moduler le montant des cotisations sociales à l’échéance du 5 avril 2020 ?

Si le règlement des cotisations est réalisé hors DSN : Il est possible d’adapter le montant de votre virement, ou bien de ne pas effectuer de virement.

Dans ce cadre, il est conseillé d’en informer conjointement l’URSSAF, notamment via la messagerie de l’espace en ligne.

Si le règlement des cotisations est réalisé via la DSN : Il est possible de moduler le paiement SEPA au sein de cette DSN.

Une entreprise peut-elle opter pour une modulation de ses seules cotisations patronales ?

Oui, l’employeur qui ne souhaite pas opter pour un report de l’ensemble de ses cotisations, et préfère régler les cotisations salariales, peut échelonner le règlement des cotisations patronales, comme habituellement depuis l’espace en ligne sur www.urssaf.fr (Rubrique « Nouveau message » / « Une formalité déclarative » / « Déclarer une situation exceptionnelle »).

Un report des cotisations de retraite complémentaire est-il également possible ?

Oui, mais pour ce faire, les employeurs sont invités à se rapprocher de leur institution de retraite complémentaire.

Jacques Perotto, Jean-Christophe Brun et Quentin Kéraval, Avocats en droit social.

Les ordonnances sociales COVID-19

Le gouvernement n’a pas perdu de temps !

Immédiatement après la promulgation de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 présentée dans notre dernière newsletter, le conseil des ministres a adopté le mercredi 25 mars pas moins de 25 ordonnances en matière civile, pénale et administrative.

Trois d’entre-elles ont été présentées par le ministère du travail : l’une portant mesures d’urgence en matière de congés payés, durée du travail et jours de repos, l’autre adaptant temporairement l’indemnisation des salariés en arrêt de travail ainsi que les modalités de versement des primes d’intéressement et de participation, la dernière portant mesures d’urgence en matière de revenu de remplacement.

Congés payés

Dans notre newsletter du 23 mars dernier nous vous indiquions que l’employeur ne pouvait pas imposer à un salarié de prendre ses congés payés pour faire face à la crise sanitaire ; seule une modification des congés déjà posés pouvant être imposée pour circonstances exceptionnelles.

Désormais l’employeur pourra imposer les dates de congés de ses salariés, à la condition toutefois de conclure préalablement un accord d’entreprise, ou de se trouver dans le champ d’application d’une convention collective de branche ayant négocié un accord le permettant.

Le département social se tient à votre entière disposition pour vous assister dans la rédaction d’un tel accord qui vous permettra :

– D’imposer ou modifier les dates de prise des congés payés de ses salariés dans la limite de six jours ouvrables, en respectant un délai de prévenance d’un jour franc ;

– D’imposer le fractionnement des congés payés sans être tenu de recueillir préalablement l’accord du salarié ;

– De suspendre temporairement le droit à un congé simultané des conjoints travaillant dans une même entreprise, si la présence de l’un d’eux s’avère indispensable.

Jours de repos

L’employeur pourra imposer ou modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus par les conventions de forfait ainsi que les jours de repos affectés sur le compte épargne temps des salariés, dans la limite de 10 jours et sous réserve de respecter un préavis d’un jour franc. La période de prise des jours de repos imposée ou modifiée ne peut s’étendre au-delà du 31 décembre 2020.

Durée du travail

Sur ce point, l’ordonnance n’apporte pas grand-chose puisqu’elle indique simplement que la liste des entreprises « de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation » et nécessaires « à la continuité de la vie économique et sociale » qui seront autorisées à déroger aux règles d’ordre public et aux dispositions conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical, sera précisée ultérieurement par Décret.

Pour autant, ces entreprises, jusqu’au 31 décembre 2020, seront autorisées à :

– porter la durée quotidienne maximale de travail à 12 heures ;

– porter la durée quotidienne maximale de travail à 12 heures pour les travailleurs de nuit, sous réserve de l’octroi d’un repos compensateur équivalent ;

– réduire la durée de repos quotidienne à 9 heures, sous réserve de l’attribution d’un repos compensateur égal à la durée de repos dont le salarié n’a pu bénéficier ;

– porter la durée hebdomadaire maximale de travail à 60 heures ;

– porter la durée hebdomadaire maximale moyenne sur une période de 12 semaines consécutives à 48 heurs (44 heures pour les travailleurs de nuit)

– déroger à la règle du repos dominical en attribuant un repos hebdomadaire par roulement.

L’employeur qui utilise l’une de ces dérogations devra, sans délai et par tout moyen, en informer le CSE et la Direccte.

Indemnisation des salariés arrêtés en raison de l’épidémie

L’ordonnance adaptant temporairement l’indemnisation des salariés en arrêt de travail en raison de l’épidémie n’est que la retranscription de dérogations déjà admises par différents décrets parus en février et mars 2020, concernant notamment la suppression du délai de carence et de la condition d’ancienneté d’un an pour bénéficier du complément de salaire versé par l’employeur.

Cette disposition initialement prévue jusqu’au 30 avril 2020 est prorogée jusqu’au 31 aouût 2020.

Intéressement et participation

La même ordonnance que celle relative à l’indemnisation des salariés arrêtés du fait de l’épidémie adapte les dates limites de versement des sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation.

Ces sommes sont en principe versées avant le 1er jour du sixième mois suivant la clôture de l’exercice, soit, pour une entreprise dont l’exercice correspond à l’année civile, au plus tard le 31 mai.

Désormais, la date limite de versement aux bénéficiaires des sommes attribuées en 2020 au titre d’un régime d’intéressement ou de participation est reportée au 31 décembre 2020.

Assurance chômage

Cette ordonnance permet aux demandeurs d’emploi ayant épuisé leur droit au 12 mars 2020 de continuer à bénéficier des aides allouées par le Pole Emploi jusqu’à une date qui sera fixée par décret, et au plus tard, jusqu’au 31 juillet 2020.

Pour information, la réforme de l’assurance chômage qui devait entrer en vigueur le 1er avril 2020 est reportée au mois de septembre 2020.

Jean-Christophe Brun et Jacques Perotto, associés en droit social

COVID-19 – Le point sur les règles d’urgence en droit des sociétés

Deux ordonnances n°2020-318 et n°2020-321 du 25 mars 2020 prises en application de la loi d’urgence n°2020-290 du 23 mars 2020 habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnance apportent eu égard au contexte exceptionnel de la pandémie en cours de covid-19 des aménagements et dérogations substantiels aux textes en vigueur en matière de convocation et de tenue des réunions des assemblées et des organes de gouvernance des personnes morales.

Qui sont les personnes morales concernées ?

Toutes les personnes morales de droit privé sont concernées y compris celles dépourvues de personnalité juridique. Sont donc concernées : toutes les sociétés civiles et commerciales, cotées ou non cotées, les masses de porteurs de valeurs mobilières, les sociétés d’assurance ou encore les associations type « loi 1901 » et les fonds de dotation. A noter que les ordonnances ne s’appliquent pas aux établissements publics qui sont régis par leurs statuts respectifs lesquels répliquent souvent (notamment les EPIC) un mode de fonctionnement proche des sociétés anonymes de droit privé. Cela fera l’objet d’une autre ordonnance spécifique.

Quelle période est visée ?

L’ordonnance n°2020-321 s’applique aux assemblées et aux réunions des organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction tenues à compter du 12 mars 2020 (elle a donc de ce point un effet rétroactif) et jusqu’au 31 juillet 2020 (sauf prorogation décidée par décret mais pas au-delà du 30 novembre 2020).

Quelles sont les mesures dérogatoires concernant les convocations des assemblées générales et le droit à l’information ?

Aucune disposition spécifique n’est indiquée pour les sociétés non cotées, de sorte qu’il conviendra de poursuivre sur le même mode de convocation que celui prévu par les statuts ou les règles impératives applicables tout en bénéficiant pour la tenue des assemblées elles-mêmes des aménagements prévus par l’ordonnance.

Pour les sociétés cotées, il est prévu que lorsque l’entité est tenue de convoquer par voie postale (actionnaires au nominatif notamment), « aucune nullité de l’assemblée n’est encourue du seul fait qu’une convocation n’a pas pu être réalisée par voie postale en raison de circonstances extérieures à la société ». C’est donc par le biais d’une absence de sanction d’une irrégularité de la convocation que le gouvernement a choisi de traiter le sujet. Les motifs de l’ordonnance précisent que « Ces circonstances extérieures recouvrent notamment l’hypothèse dans laquelle les sociétés mentionnées audit article – ou leurs prestataires – ont été empêchées d’accéder à leurs locaux ou de préparer les convocations nécessaires, dans le contexte de l’épidémie de covid-19 ».

Concernant le droit à l’information, l’article 3 du décret qui ratisse large et vise toutes les formes de droit à l’information autorise les personnes morales concernées à répondre à une telle demande par message électronique sous réserve que le demandeur indique l’adresse électronique à laquelle elle peut être faite.

Quelles sont les mesures dérogatoires en matière de réunion et de délibération des assemblées ?

Lorsque l’assemblée est convoquée dans un « lieu affecté à la date de la convocation ou à celle de la réunion » par une mesure restreignant les rassemblements collectifs (ce qui est le cas depuis le 13 mars 2020 pour les rassemblements de plus de 100 personnes sur tout le territoire national et pour tout rassemblement depuis l’entrée en vigueur du confinement le 17 mars 2020), l’organe compétent (par exemple, le gérant de la société civile ou de la SARL, le conseil d’administration de la SA ou le président de la SAS, sauf dispositions statutaires spécifiques) peut décider qu’elle se tiendra sans présence physique des participants (en ce compris les associés, les commissaires aux comptes et toute personne pouvant en principe assister à l’assemblée).

Peuvent alors être utilisés tous les autres moyens de participation prévus par les textes en vigueur comme l’envoi d’un pouvoir, le vote par correspondance et si l’organe compétent le décide sur le fondement de l’ordonnance précitée, par voie de visioconférence ou de télécommunication, ou de consultation écrite (ce dernier mode étant utilisable lorsque la loi le prévoit pour le type d’entité considérée sans pour autant que les statuts ou le contrat d’émission n’ait à le prévoir). Sont alors réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité, les membres des assemblées qui participent par une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant leur identification et des moyens techniques transmettant au moins la voix des participants de manière « continue et simultanée ».

Certains droits s’en trouveront forcément affectés comme le droit de poser des questions orales (encore que l’on puisse imaginer de maintenir ce droit lorsque les « assemblées virtuelles » ne réuniront que peu de membres ou de modifier les résolutions en séance dans les sociétés anonymes) mais d’autres restent inchangés comme le droit de poser des questions écrites ou de demander l’inscription de résolutions à l’ordre du jour.

Que faire si les convocations ont déjà été envoyées ?

L’ordonnance autorise l’organe compétent pour convoquer à informer les participants par tous moyens permettant d’assurer leur information effective 3 jours ouvrés au moins avant la date de l’assemblée (sans préjudice des formalités qui restent à accomplir à la date de cette décision) de la nouvelle modalité choisie pour la « réunion ». Le texte n’étant pas plus précis, on peut imaginer que le courrier électronique sera admis mais encore faut-il que l’organe compétent dispose des adresses emails de tous les participants. La modification du mode de consultation est une simple information et ne nécessite pas de renouveler formellement les convocations.

A noter que par exception, les sociétés cotées qui ont déjà initié leur processus de convocation de leur assemblée annuelle (publication au BALO de l’avis de réunion par exemple), peuvent informer leurs actionnaires des nouvelles modalités de « réunion » dès que possible par voie de communiqué dont la diffusion effective et intégrale est assurée par la société. L’expression « dès que possible » semble déroger au délai de 3 jours ouvrés prévu au I de l’article 7 de l’ordonnance mais étant donné la mauvaise qualité rédactionnelle du texte, il serait prudent d’appliquer également le délai susmentionné de 3 jours ouvrés dans le cas des sociétés cotées.

Qu’est-il prévu concernant les organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction ?

Les organes des entités concernées peuvent désormais (sans que leurs statuts ne puissent s’y opposer ou que leur règlement intérieur n’ait à prévoir une règle particulière) :

– tenir leur réunion sans présence physique quel que soit le sujet. Sont réputés présents à ces réunions les membres qui participent au moyen d’une conférence téléphonique ou audiovisuelle permettant leur identification et garantissant leur participation effective avec transmission au minimum de la voix en continu et simultané ;

– choisir de délibérer par voie de consultation écrite « dans des conditions assurant la collégialité de la délibération ».

Est-il prévu de permettre le report des AG d’approbation des comptes annuels au-delà de six mois après la clôture de l’exercice ?

Oui. L’ordonnance n°2020-318 prévoit effectivement un report de 3 mois du délai donné aux personnes morales de droit privé pour approuver leurs comptes annuels ou pour convoquer l’assemblée chargée de cette approbation. A noter que cette prorogation ne s’applique pas aux entités concernées dont le commissaire aux comptes a déjà émis son rapport sur les comptes à la date du 12 mars 2020. Des prorogations de 3 mois pour la présentation des documents afférents aux comptes annuels par le directoire au conseil de surveillance de la SA et de 2 mois pour l’établissement des documents de gestion prévisionnelle par les sociétés passant les seuils réglementaires sont également prévus.

Quelles recommandations pour les « réunions » à venir ?

Pour ceux qui choisiront de recourir aux modes alternatifs de réunion prévus par l’ordonnance, il convient de prévoir et de faire connaitre aux participants les règles de connexion (adresse et modalités techniques, délai raisonnable pour se connecter, vérification par l’organe convocateur des personnes présentes avec confirmation à la voix que ce sont bien elles et qu’elles participent, etc.). Il faut ensuite correctement documenter dans les procès-verbaux la mention du recours à ces modes alternatifs, rappeler le contexte et la raison pour laquelle ils sont utilisés.

Pierre-Olivier Brouard, Christophe Gerschel, Vincent Poirier et Antoine Rousseau, associés en droit des sociétés.

COVID-19 – Point sur les procédures et délais fiscaux en période d’urgence sanitaire

Comme nous l’évoquions dans une récente newsletter, des mesures fiscales d’urgence ont été prises pour venir en aide aux entreprises qui rencontrent actuellement de grandes difficultés.

Une série d’ordonnances, publiées ce 26 mars 2020, vient compléter ces mesures, en prévoyant notamment l’aménagement de certains délais fiscaux. Ces ordonnances nous offrent l’occasion de faire, plus largement, un tour d’horizon sur les procédures en cours et les délais en matière fiscale, en cette période de crise.

S’agissant des contrôles fiscaux

La Direction Générale des Finances Publiques a annoncé que, sauf exception, elle n’engagerait aucun nouveau contrôle pendant la période de crise sanitaire et que, s’agissant des contrôles en cours, toutes les opérations non urgentes seraient différées.

Les envois de propositions de rectification sont stoppés, ainsi que ceux des avis de mise en recouvrement.

S’agissant des contrôles en cours, la plupart sont en pratique suspendus. En tout état de cause, tous les délais en cours dans le cadre de ces procédures sont suspendus pour la période comprise entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

Pour les avis de mise en recouvrement déjà reçus, l’article 11 de l’ordonnance 2020-306 dispose que les délais applicables en matière de recouvrement et de contestation des créances publiques sont suspendus pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, augmentée de 3 mois.

Il reste néanmoins nécessaire de déposer une réclamation contentieuse assortie d’une demande de sursis de paiement pour éviter toute mesure d’exécution forcée. Les comptables publics sont toutefois invités à tenir compte des graves difficultés rencontrées par certaines entreprises, et une ordonnance (2020-326) a d’ailleurs été prise pour les décharger de leur responsabilité en cas de manquements à la règlementation.

Enfin, l’ordonnance précitée suspend les délais de prescription du droit de reprise qui arrivent à terme le 31 décembre 2020. Ainsi, le droit de reprise dont disposait l’administration pour contrôler, notamment, les déclarations de résultat des entreprises au titre de l’exercice clos en 2017, ou les revenus des particuliers perçus en 2017, sera prolongé au-delà du 31 décembre, d’une durée égale à celle de l’état de crise sanitaire (délai courant entre le 12 mars 2020 et la fin de l’état d’urgence sanitaire), majoré d’un mois.

S’agissant des contentieux juridictionnels

Des aménagements sont également prévus dans le cadre des contentieux en cours devant les juridictions administratives ou judiciaires.

En premier lieu, les ordonnances visent à simplifier les échanges, en prévoyant la possibilité de communiquer les actes et les pièces par tous moyens.

En second lieu, une prorogation de délai de plein droit est prévue pour un certain nombre de mesures administratives ou juridictionnelles dont le terme vient à échéance au cours de la période d’urgence sanitaire, pour une durée de 2 mois commençant à courir à la fin de cette période.

Enfin, les clôtures d’instruction dont le terme vient à échéance du 12 mars 2020 jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de ladite période, à moins que ce terme ne soit reporté par le juge.

S’agissant des autres délais fiscaux

La prorogation des délais pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire et le mois suivant concerne globalement l’ensemble des délais fiscaux.

Si les rescrits sont expressément visés, cette prorogation nous semble également applicable à l’ensemble des délais d’options fiscales (option pour l’IS ou pour l’intégration fiscale, par exemple).

Des clarifications sont espérées dans des situations plus spécifiques, telle que celles des obligations de réinvestissement, dans le cadre d’opérations d’apport cession (art. 150-0 B ter du CGI), dont le terme viendrait à expiration pendant la période d’état d’urgence sanitaire.

Christophe Gerschel, Philippe Pescayre, Stanislas Vailhen et Julien Lebel.

A l’ère du Covid-19, vers la légalisation en Europe d’un « backtracking » inédit ?

• Le pistage en temps réel des données mobiles de millions d’abonnés pour évaluer la transmission du virus

Pour tenter de faire face à la pandémie désormais mondiale du Covid-19, les gouvernements de nombreux pays misent sur le suivi des données de géolocalisation de leurs citoyens contenues dans leurs équipements mobiles afin de limiter la propagation du virus en retraçant leurs mouvements et leurs déplacements en temps réel.

Après le premier exemple des pays asiatiques, et notamment Taïwan et Singapour qui appliquent une version très ferme du « backtracking », l’Union européenne ne fait pas exception. En effet, le 23 mars 2020, le Commissaire européen chargé du marché intérieur, Thierry Breton, a demandé à plusieurs opérateurs télécoms nationaux, dont Orange en France, de fournir les données de leurs clients aux autorités publiques liées à la localisation géographique de ces derniers. En France, un comité composé de chercheurs et de médecins est réuni depuis le 24 mars pour conseiller le gouvernement sur les moyens, notamment numériques, pouvant endiguer la propagation du coronavirus. A date, le Ministre de la santé en France se dit hostile au recours à de tels dispositifs de traçage numérique ou ne devrait-on pas dire de pistage.

Ce pistage des données mobiles en Europe n’est possible qu’avec le concours des opérateurs télécoms nationaux qui doivent les fournir sur demande expresse des autorités publiques compétentes. Une fois reçues, les données sont anonymisées et agrégées à des fins statistiques : toute identification individuelle, directe ou indirecte, des abonnés concernés par la collecte de ces données à caractère personnel serait alors impossible.

Ainsi, l’objectif est clair : suivre les déplacements des personnes et connaître les besoins d’aide médicale en fonction des lieux fréquentés, des interactions sociales et espérer repérer les personnes exposées au coronavirus.

Selon l’initiative européenne, un seul opérateur serait sélectionné par pays. Toutefois, Deutsche Telecom a déjà fourni à l’Etat fédéral allemand les données de près de 46 millions d’utilisateurs et Telecom Italia collecte depuis le 9 mars dernier les données de localisation de millions de ses clients en Lombardie.

• La conformité nécessaire aux exigences légales du RGPD

Néanmoins, ce projet européen devra s’inscrire dans un respect strict des règles du RGPD afin de protéger les données personnelles et la vie privée de ses citoyens. Même s’il ne s’agit pas de données sensibles devant faire l’objet de garanties légales particulières, les données relatives à des déplacements et à des mouvements géographiques relèvent incontestablement de la sphère privée et sont considérées comme des données à caractère personnel qui requièrent une particulière vigilance en raison de leur recoupement possible avec d’autres données. A défaut d’être anonymisées, le consentement préalable est requis pour toutes données de géolocalisation.

Sur ce point précis, la CNIL avait publié sur son site, le 6 mars dernier, que « (…) l’évaluation et la collecte des informations relatives aux symptômes du coronavirus et des informations sur les mouvements récents de certaines personnes relèvent de la responsabilité de ces autorités publiques ». Dès lors, une dérogation pourrait être décidée en accord avec la CNIL dans l’hypothèse où le gouvernement français opterait pour le « backtracking ». La direction d’Orange a ainsi indiqué qu’elle attendait l’aval de la CNIL pour coopérer avec l’Inserm selon lequel la modélisation des données de géolocalisation anonymisées serait utile pour gérer la propagation du virus.

Compte-tenu du volume considérable des données traitées par les opérateurs télécoms concernant des millions de clients, la Commission européenne, responsable de traitement, devra nécessairement veiller à une utilisation proportionnée de ces données ainsi qu’à une durée de conservation non excessive de la part de ces derniers.

• Quelles conséquences sur la vie privée des personnes ?

Les problématiques relatives à la protection des données personnelles ne revêtent pas les mêmes enjeux dans le monde.

En effet, grâce au croisement massif des données entre fournisseurs de réseaux et autorités sanitaires et au Big Data, Taïwan a géré la crise sanitaire en retraçant presque totalement la chaîne de contamination du virus sur son territoire. Une telle utilisation des signaux mobiles, sans anonymat, pour enregistrer l’historique des déplacements des personnes ne serait nullement acceptable en Europe.

La méthode retenue par Israël ne semble pas faire écho non plus à nos valeurs protectrices de la vie privée. En effet, en se basant sur des usages mettant en péril le respect des libertés fondamentales et la vie privée et équivalents à ceux mis en œuvre en matière d’anti-terrorisme, le service de renseignement intérieur peut retracer les parcours des personnes contaminées par le virus sans aucune autorisation préalable de la justice.

Ne parlons pas de l’option retenue par la Chine et la Russie qui ont recours massivement à la reconnaissance faciale pour traquer individuellement toutes les personnes qui ne respecteraient pas les mesures de confinement.

L’ensemble de ces pays ont pour culture et valeur assumées de faire prévaloir le collectif sur l’individu avec les dérives que l’on peut dénoncer par ailleurs.

Ainsi, ne doit-on pas craindre une mise en péril de nos libertés individuelles et de nos vies privées auxquelles nos sociétés occidentales sont attachées et à raison par l’enjeu d’impératif public que constitue la crise sanitaire du Covid-19 ? De toute évidence, les garde-fous mis en place dans nos démocraties européennes sont bel et bien défiés par les déploiements technologiques massifs de certains Etats. Il ne faudrait pas que cette pratique de « backtracking » soit en réalité envisagée, et pour finir peut-être adoptée en réalité déjà trop tardivement, tout simplement parce que les Etats européens n’avaient pas assez anticipé la crise sanitaire en constituant des stocks suffisants de masques, de gels hydroalcooliques ou de tests, notamment.

En attendant une éventuelle légalisation d’un « backtracking » européen respectueux de la vie privée, tâchons de faire preuve de clairvoyance et de vigilance quant au réel intérêt sanitaire qu’une telle mesure inédite et potentiellement dangereuse pourrait revêtir une fois la pandémie arrivée en Europe.

Corinne Thiérache, associée, et Alice Gautron, avocat.

COVID-19 : Mesures prises pour sécuriser vos procédures contentieuses actuellement en cours devant les juridictions prud’homales

Depuis la fermeture des tribunaux le 16 mars 2020, toutes les audiences non urgentes sont annulées et les affaires reportées à des dates ultérieures. En parallèle, la loi urgence adoptée le 22 mars dernier par le Parlement tend à la sécurisation des délais en cours, notamment des délais de prescription, en prévoyant leur aménagement, suspension ou interruption de manière rétroactive.

Depuis le 16 mars 2020, les tribunaux français ont fermé leurs portes et suspendu leur activité, dans le cadre du plan de continuité de l’activité (PCA) mis en place par la Chancellerie.

Se pose aujourd’hui la question de la continuité du traitement des dossiers contentieux actuellement en cours devant les juridictions nationales, notamment en matière prud’homale.

Désormais, seules les affaires les plus urgentes – ou « contentieux essentiels » – sont audiencées, à savoir principalement les affaires pénales.

Toutes les autres affaires font systématiquement l’objet d’un renvoi à une date ultérieure.

En outre, en raison du confinement, les Avocats ne peuvent se rendre au sein des tribunaux et il leur est demandé de communiquer par voie dématérialisée avec les juridictions (email ou RPVA « Réseau privé des Avocats » pour les Cours d’appel).

En matière sociale plus particulièrement, nous avons d’ores et déjà pris attache avec plusieurs Conseils de prud’hommes (Paris, Boulogne-Billancourt, Evreux etc.) et Cours d’appel (Paris et Versailles) lesquels nous ont confirmé leur fermeture jusqu’à nouvel ordre.

Selon nos informations, toutes les affaires audiencées jusqu’à la fin du mois d’avril 2020 devraient connaitre le même sort.

Dans ce contexte, afin de préserver vos droits en toutes circonstances, nous avons mis en place les diligences suivantes :

• Contact par email (ou RPVA) du CPH ou de la Cour d’appel, et de la partie adverse, avant toute audience initialement prévue afin d’acter le report à une date ultérieure ;

• Information systématique de nos clients du renvoi de l’affaire sans date déterminée ;

• Lors de la levée du confinement et de la réception des bulletins de renvois des greffes, transmission à nos clients de la nouvelle date d’audience.

Enfin, la loi urgence adoptée par le Parlement le 22 mars 2020 permet au Gouvernement, par voie d’ordonnance, de prendre toute mesure aménageant (interruption et suspension notamment) les délais, recours et prescriptions, et ce afin de faire face aux conséquences juridictionnelles de la propagation de l’épidémie.

Ce moratoire prendra effet rétroactivement au 12 mars 2020, pour une durée de trois mois.

La publication de ces ordonnances constituera donc, en principe, une garantie supplémentaire s’agissant de la conservation des droits des justiciables.

Jacques Perotto et Arielle Duchène, Avocats en droit social

Le projet de loi d’urgence sanitaire est définitivement adopté

Volet social, une tentative pour étoffer la boîte des outils disponibles pour affronter la crise sanitaire dans les entreprises.

La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a été promulguée le 23 mars 2020 et publiée au journal officiel le 24 mars 2020.

Ce texte autorise le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances, dans un délai de 3 mois à compter de la promulgation de la loi, pour modifier de nombreuses dispositions en droit du travail, le Premier Ministre ayant promis hier soir une première fournée d’ordonnances dès le 25 mars.

Mais ouvrons donc la boîte à outils :

Activité partielle

Rappelons que selon un projet de décret non publié à ce jour, il est d’ores et déjà prévu :

– De déplafonner le montant de l’allocation versée par l’Etat en remboursement de l’indemnité d’activité partielle versée par l’employeur dans la limite de 4,5 SMIC ;

– D’adresser une seule demande pour les entreprises multi-établissements ;

– D’accorder un délai de 30 jours pour déposer sa demande ;

– D’accorder un délai de deux mois à compter de la demande d’autorisation pour envoyer l’avis du CSE;

– De bénéficier d’une durée maximum de 12 mois d’autorisation d’activité partielle.

Aux termes de la loi d’urgence, il est toujours question de renforcer le recours à l’activité partielle pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille, notamment en l’ouvrant à de nouveaux bénéficiaires (salariés du particulier employeur, assistante maternelle, indépendants…), en favorisant une meilleure articulation avec la formation professionnelle et adaptant de manière temporaire le régime social applicable aux indemnités versées.

Congés payés

Un accord d’entreprise ou de branche pourra autoriser un employeur à imposer ou modifier les dates de prise d’une partie des congés payés de ses salariés dans la limite de six jours ouvrables, en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités de prise de ces congés.

Le projet de loi initial prévoyait la possibilité pour l’employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates de prise de congés des salariés. Cette faculté est désormais conditionnée à la conclusion préalable d’un accord d’entreprise.

RTT

Ce qui vaut pour les congés payés, ne vaut pas pour les jours de RTT !

En effet, par ordonnance, le gouvernement pourra permettre à tout employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus par les conventions de forfait ainsi que les jours de repos affectés sur le compte épargne temps des salariés, en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités de prise de ces congés.

Durée du travail et repos hebdomadaire et dominical

Les entreprises « de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation » mais également celles nécessaires « à la continuité de la vie économique et sociale » seront autorisées à déroger aux règles d’ordre public et aux dispositions conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical.

Epargne salariale

Le gouvernement devrait modifier les dates limites et modalités de versement des sommes dues au titre de l’intéressement et/ou de la participation.

Rappelons ces sommes sont en principe versées avant le 1er jour du sixième mois suivant la clôture de l’exercice.

Prime pouvoir d’achat

C’est le retour de la « prime Macron » instaurée en 2019 à l’occasion de la crise des gilets jaunes et reconduite en 2020 mais uniquement pour les entreprises bénéficiant d’un accord d’intéressement.

Ce dispositif permet aux entreprises de verser à leurs salariés une prime d’un montant maximum de 1.000 euros totalement défiscalisée et sans charges sociales.

Le ministre de l’économie a déjà annoncé sur son compte tweeter que la condition tenant à la conclusion d’un accord d’intéressement serait supprimée pour les entreprises de moins de 250 salariés.

CSE

Une ordonnance devrait prochainement modifier les modalités d’information et de consultation du Comité Social et Economique afin qu’il puisse rendre ses avis dans les délais impartis en facilitant le recours à la visioconférence et aux procédures dématérialisées afin de garantir le secret des votes.

Par ailleurs, les processus électoraux en cours au moment du confinement seront suspendus.

Médecine du travail

Une ordonnance viendra préciser selon quelles modalités les services de santé au travail poursuivront leur mission pendant toute la période de l’épidémie.

Jean-Christophe Brun et Benoît Dehaene, Avocats en droit social

COVID-19 et congés payés

L’employeur peut-il modifier unilatéralement les dates de congés payés déjà posés par un salarié ?

Oui l’employeur peut modifier les dates des congés payés d’ores et déjà posés par ses salariés sous réserve de respecter, le cas échéant, un certain délai de prévenance qui est fixé :

– Par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par la convention collective de branche (Article L. 3141-15 du code du travail) ;

– A défaut de dispositions conventionnelles spécifiques, le délai sera d’un mois minimum avant la date de départ prévue ; exception faite de « circonstances exceptionnelles » pour lesquelles aucun délai n’est imposé (Article L. 3141-16 du code du travail).

Le COVID-19 est-il une circonstance exceptionnelle ?

La Code du travail ne précise pas la notion de « circonstances exceptionnelles » mais la jurisprudence admet que des raisons économiques telles les nécessités impératives de livraisons (Cass. soc., 17 juillet 1989, n°89-43.310) ou encore le remplacement d’un salarié décédé (Cass. soc., 15 mai 2008, n°06-44.354) puissent caractériser de telles circonstances.

Au regard de la gravité de la situation sanitaire actuelle, on pourrait arguer des conséquences préjudiciables de l’épidémie sur le fonctionnement de l’entreprise pour justifier de circonstances exceptionnelles. Cela d’autant que Ministère du travail a lui-même fait référence à l’existence de circonstances exceptionnelles en évoquant la possibilité, pour l’employeur, « de déplacer des congés déjà posés par le salarié sur une autre période à venir pour couvrir la période de 14 jours [correspondant à la première période de confinement], compte tenu des circonstances exceptionnelles en application de l’article L. 3141-16 du code du travail ». (Circulaire QR du 9 mars 2020 – Coronavirus – COVID 19, QR 21).

A titre d’exemple, deux semaines de vacances planifiées début mai pourraient ainsi être avancées fin mars, sans que le salarié ne puisse dès lors s’y opposer.

A contrario, l’employeur peut-il imposer au salarié, qui n’aurait pas posé de congés payés, d’en prendre ?

A ce jour, l’employeur ne peut pas imposer à un salarié de prendre ses congés payés pour faire face à la crise sanitaire ; seule une modification des congés déjà posés pouvant être imposée pour circonstances exceptionnelles.

Cette position est également celle du Ministère du travail (Circulaire QR du 9 mars 2020 – Coronavirus – COVID 19, QR 21).

Néanmoins, la réponse devrait évoluer vers plus de flexibilité dans les prochains jours.

En effet, l’article 7-7 de la « loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid -19 », adoptée par le Parlement le 22 mars 2020, autorise le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, des dispositions permettant aux entreprises d’imposer ou de modifier les dates de prise d’une partie des congés payés en dérogeant notamment aux délais de prévenance.

Cette faculté devra être :

– Prévue par un accord d’entreprise ou de branche ;

– Limitée à 6 jours ouvrables.

En tout état de cause, et dans l’attente de la future ordonnance, rien n’interdirait à l’employeur de proposer au salarié de prendre des congés payés dans les prochains jours ; et de procéder d’un commun accord.

Cette faculté peut être intéressante pour gérer la situation de salariés provisoirement bloqués à l’étranger (exclusivement pour des raisons personnelles), sans pouvoir mettre en place du télétravail ; et qui, à défaut, se trouveraient en absence injustifiée et donc sans rémunération (Cass. soc., 17 novembre 1977, n°76-40.966 ; Cass. soc., 10 juin 2008, n°06-46.000).

Un salarié peut-il annuler ses congés payés notamment pour bénéficier du régime de l’activité partielle et conserver ainsi son solde de congés ?

Non, un salarié n’a pas la faculté d’annuler unilatéralement des congés payés d’ores et déjà posés, cela sous réserve d’éventuelles règles contraires applicables au niveau de l’entreprise.

En application de l’article L. 3141-16 du Code du travail, l’employeur peut donc refuser une demande d’annulation de ses congés payés formulée par un salarié, ces derniers devant alors être maintenus.

Qu’en est-il pour les JRTT ? Un employeur peut-il imposer la prise de JRTT ?

La faculté, pour l’employeur, d’imposer à ses salariés la prise de JRTT dépend, en principe, de la rédaction et des modalités prévues par l’accord collectif d’aménagement du temps de travail (délai de prévenance, modalités d’information, etc …).

En effet, le Ministère du travail rappelle que ces accords peuvent « fixer des JRTT à la libre disposition de l’employeur, le délai de prévenance et les modalités de modification du calendrier de prise. Les JRTT à la libre disposition de l’employeur peuvent être positionnés librement par celui-ci au cours de la période de référence. Si l’employeur souhaite modifier leur positionnement en cours de période, il doit le faire en respectant le délai prévu par l’accord collectif. » (Circulaire QR du 9 mars 2020 – Coronavirus – COVID 19, QR 21).

Néanmoins, l’article 7-8 de la « loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 », autorise le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, des dispositions permettant aux entreprises d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail.

Cette faculté est également étendue aux :

– Jours de repos prévus par les conventions de forfait

– Jours de repos affectés sur le compte épargne temps du salarié.

Jacques Perotto, Benoît Dehaene, Arielle Duchène et Quentin Kéraval, avocats en droit social

Actualités du COVID 19 : ATTENTION le COVID-19 n’est pas une cause automatique justifiant une demande d’activité partielle

Dans la continuité de l’annonce faite hier par Monsieur le Président de la République Emmanuel Macron exhortant les entreprises et les salariés à poursuivre leur activité « dans le respect des règles de sécurité sanitaire », les retours de terrain font état des premiers refus opposés par l’Administration aux entreprises sollicitant la mise en œuvre de l’activité partielle.

Bien qu’en contradiction avec les premières annonces présidentielles et gouvernementales, ce constat est corroboré par diverses notes internes, édictées par plusieurs services de l’Etat, qui rappellent que l’octroi du chômage partiel ne doit pas être automatique.

Dans l’attente d’une clarification nécessaire du Ministère du travail, et pour éviter tout refus de prise en charge dans l’intervalle, il est conseillé d’être particulièrement vigilant et précautionneux dans la motivation des demandes adressées à l’Administration ainsi que dans la construction des dossiers afférents.

Comme le signale la DIRECCTE du Grand-Est, la « demande doit indiquer précisément les effets de l’épidémie du Covid19 sur l’activité de votre entreprise ».

Une simple référence à l’épidémie n’apparait pas suffisante et vous expose à un refus de l’Administration !

A notre sens, il convient néanmoins de distinguer trois hypothèses qui dépendent de l’activité des entreprises concernées :

1. Les entreprises visées par une interdiction d’ouverture (principalement les commerces accueillant du public et jugés « non indispensables à la vie de la Nation ») :

Le risque de refus de prise en charge par l’Administration apparait faible, voire inexistant ; l’activité partielle tombant sous le sens compte tenu des fermetures imposées et de l’impossibilité de recourir au télétravail pour ce type d’activité.

2. Les entreprises dont l’activité est jugée comme étant « indispensable à la vie de la Nation » en application de l’arrêté du 14 mars 2020 relatif au covid-19 (JORF n°0064).

Le risque de refus de prise en charge par l’Administration ne peut être exlu compte tenu de l’absence de fermeture imposée ; une motivation approfondie des demandes semble donc s’imposer (Absence massive de salariés indispensables, baisse d’activité liée à l’épidémie, impossibilité de recourir au télétravail, etc …).

3. Les entreprises n’accueillant pas du public et non visées par une interdiction d’ouverture :

En l’absence de justification précise des conséquences de l’épidémie sur l’activité de l’entreprise et de l’impossibilité de recourir au télétravail, le risque de refus est probable car, selon l’Administration, « l’arrêt est l’exception, pas la règle ».

Sauf motif légitime, les établissements industriels, les entreprises du BTP, les entrepôts, les marchés de gros, exploitants agricoles et autres sont incités à continuer leurs activités dans le respect des règles sanitaires.

Pour rappel, le Ministère du Travail a octroyé un délai de 30 jours aux entreprises pour déclarer leur activité partielle, avec effet rétroactif. Il est donc important de ne pas se précipiter et de prendre le soin de suffisamment motiver la demande formulée à l’Administration.

Pour ce faire, vous pouvez naturellement contacter notre hotline dédiée qui pourra, notamment, vous assister dans la construction de vos dossiers relatifs à la mise en œuvre de l’activité partielle.

Jacques Perotto, Benoît Dehaene et Quentin Kéraval, avocats en droit social

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Version mise en ligne Janvier 2020

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