Projet de loi de finances pour 2023

10 novembre 2022
Stanislas Vailhen, Mathilde Colonna d'Istria et Maxime Sniegula

Dépourvu de majorité absolue à l’Assemblée Nationale, le gouvernement a fait adopter le 20 octobre dernier la première partie du projet de loi de finances pour 2023, en application de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution. 

Cette loi de finances ne comporte pas de réforme d’envergure, mais plutôt, pour l’essentiel, des mesures techniques et la prorogation de plusieurs dispositifs fiscaux. On relèvera néanmoins quelques mesures de soutien aux entreprises, comme notamment la suppression progressive de la CVAE.

Vous trouverez ci-après une sélection des principales mesures, classées par thèmes. Ces dispositions devront être confirmées en deuxième lecture, après le passage devant le Sénat, même si l’utilisation de l’article 49.3 laisse présager a priori peu d’évolutions du texte.

Fiscalité des particuliers :

Améliorations du mécanisme du prélèvement à la source (PAS)

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit d’abaisser le seuil permettant une modulation à la baisse du prélèvement à la source (PAS). Un écart de 5 % entre le montant du prélèvement supporté par un contribuable en l’absence de modulation et le montant du prélèvement résultant des revenus estimés de l’année en cours par celui-ci serait suffisant (contre 10 % actuellement).

Le mode de recouvrement de l’impôt sur le revenu relatif aux rémunérations versés par un employeur étranger pour une activité exercée en France par un salarié qui n’est pas à la charge d’un régime général de sécurité social français serait modifié, en substituant à la retenue à la source le régime de l’acompte du PAS.

Réduction d’impôt Madelin (IR-PME) : prorogation du taux majoré de 25 %

Le taux de la réduction d’impôt pour souscription en numéraire au capital de PME avait été porté à 25% (au lieu de 18%), pour les souscriptions réalisées jusqu’au 31 décembre 2022. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit de proroger l’application du taux majoré jusqu’au 31 décembre 2023.

Fiscalité des entreprises :

Rehaussement du bénéfice imposable au taux réduit de 15%

Le montant maximum de bénéfices imposés au taux de 15% serait porté de 38 120 euros à 42 500 euros afin de soutenir le développement des petites et moyennes entreprises.

Extension et harmonisation des dispositifs d’étalement des subventions de recherche provenant de l’Union européenne (UE)

Les dépenses de fonctionnement exposées par les entreprises dans le cadre d’opérations de recherche scientifique ou technique peuvent, sur option, être immobilisées et amorties. Parallèlement, les subventions perçues d’un organisme public pour financer ces dépenses sont, par exception, rattachables aux résultats imposables à concurrence des amortissements pratiqués à la clôture de chaque exercice. Il est prévu d’étendre ce dispositif d’étalement aux subventions de recherches versées par l’UE et par les organismes créés par les institutions de l’UE, qui n’y sont pas éligibles actuellement.

Prorogation du régime applicable aux jeunes entreprises innovantes

Le régime d’exonération d’impôt sur les bénéfices, de taxe foncière et de contribution économique territoriale dont les jeunes entreprises innovantes (JEI) bénéficient serait prorogé jusqu’au 31 décembre 2025.

Suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

Afin de continuer la baisse de la fiscalité de la production engagée ces dernières années, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) serait supprimée en deux ans :

  • une réduction de 50 % serait d’abord appliquée sur le montant de la cotisation due par les entreprises redevables en 2023 ;
  • puis la CVAE serait supprimée à compter de 2024.

Prorogation du « crédit d’impôt collection » au profit des entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit de proroger de deux ans le crédit d’impôt au titre des dépenses engagées par les entreprises du secteur textile-habillement-cuir pour l’élaboration de nouvelles collections. Actuellement applicable jusqu’au 31 décembre 2022, ce dispositif serait prorogé jusqu’au 31 décembre 2024

Fiscalité de l’immobilier :

Plus-values immobilières : prorogation de plusieurs dispositifs d’exonération temporaires en faveur de la construction de logements

Trois dispositifs d’exonération des plus-values immobilières arrivant à terme au 31 décembre 2022 devraient être prorogés jusqu’au 31 décembre 2023. Les deux premiers dispositifs concernent les immeubles cédés en vue de la construction de logements sociaux. Le troisième concerne quant à lui la cession de droit de surélévation. Une mission d’évaluation de ces dispositifs est par ailleurs prévue ; ses conclusions pourraient conditionner leur maintien à l’avenir.

Taxe sur les logements vacants : extension du périmètre d’application et augmentation des taux

La taxe annuelle sur les logements vacants peut actuellement être appliquée dans les communes relevant d’une « zone tendue » (appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants). Afin de tenir compte des difficultés d’accès au logement, le périmètre des « zones tendues » serait étendu en appréciant la tension immobilière à partir des prix élevés à l’achat et à la location ainsi que de la proportion élevée de résidences secondaires par rapport à l’ensemble du parc de logements (la liste de ces communes serait établie par décret).

Les taux de la taxe sur les logements vacants, qui varient en fonction de la vacance du logement et s’applique sur la valeur locative du logement, seraient augmentés d’un tiers, passant à 17 % la première année (contre 12,5 % actuellement) et 34 % à compter de la deuxième année (contre 25 % actuellement).

Clarification de la rédaction de l’article 257 bis du CGI

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit de clarifier la rédaction de l’article 257 bis du Code général des impôts (CGI) afin de corriger les effets d’un arrêt du Conseil d’Etat du 31 mai 2022. Le Conseil d’Etat a considéré que l’article 257 bis du CGI, qui prévoit une dispense de TVA en cas de transmission d’une universalité de biens, ne s’appliquait pas à une cession d’immeuble achevé depuis plus de cinq ans et pour laquelle aucune option pour l’assujettissement à la TVA n’a été opérée. Cette décision allait à l’encontre de l’intention du législateur et de l’interprétation et de l’objectif de la Directive TVA.

Mesures de contrôle :

Lutte contre les fraudes transfrontalières à la TVA : obligation pour les prestataires de services de paiement (PSP) de tenir des registres de paiements transfrontaliers

Le texte transpose une directive européenne instaurant une obligation pour les prestataires de services de paiement (PSP) de tenir des registres de paiements transfrontaliers et de les mettre à la disposition de l’administration. Les autorités des Etats membres cherchent ainsi à lutter plus efficacement contre la fraude à la TVA.

Invalidation du numéro individuel d’identification à la TVA en cas de manquement aux obligations déclaratives

Le projet de loi de finances pour 2023 étend les hypothèses dans lesquelles la DGFIP est en droit d’invalider le numéro de TVA individuel afin notamment de sanctionner les manquements aux obligations déclaratives des contribuables (défaut de déclaration, déclaration incomplète ou falsifiée).

Procédure de contrôle des personnes physiques : obtention systématique des relevés de comptes bancaires auprès des banques

Dans le cadre de la procédure d’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d’un contribuable (ESFP), l’administration fiscale peut obtenir les relevés bancaires des contribuables vérifiés. Actuellement, elle doit d’abord en faire la demande auprès du contribuable vérifié avant de pouvoir s’adresser aux établissements financiers dans le cadre de son droit de communication. Il est prévu qu’à l’avenir l’administration puisse solliciter la communication de ces relevés dès le début du contrôle sans en faire la demande préalable au contribuable vérifié. Ce texte vise à renforcer l’efficacité des contrôles fiscaux des personnes physiques.

Stanislas Vailhen, Associé, Mathilde Colonna d’Istria et Maxime Sniegula, Collaborateurs.