Entrée en vigueur de la directive sur le reporting de durabilité CSRD

09 février 2024
Jacques Bouyssou & Juan Diego Niño-Vargas

L'Union européenne a adopté la directive sur le reporting des entreprises en matière de durabilité (Corporate Sustainability Reporting Directive - CSRD) afin d'établir une nouvelle référence en matière de reporting non financier[1]. La France est devenue le premier État membre de l'UE à transposer la CSRD en droit national par l'ordonnance n° 2023-1142, publiée le 6 décembre 2023.

La CSRD constitue une avancée importante par rapport à la précédente directive, la Non-Financial Reporting Directive (NFRD), qui avait été adaptée en France pour devenir la directive de performance extra-financière (DPEF).

La CSRD vise à améliorer la transparence et la cohérence du reporting en matière de durabilité dans l'UE en élargissant l’obligation à un plus grand nombre d'entreprises. Ces mesures devraient permettre de mieux comprendre l'impact d'une entreprise sur la société et l'environnement.

La mise en œuvre de la CSRD sera progressive à partir du 1er janvier 2024. L’obligation de reporting concernera d’abord les entreprises qui relèvent déjà de la NFRD, avant d’être applicable à un plus grand nombre d'entreprises, comme illustré ci-dessous :

  • Pour les comptes au titre de l’exercice de 2024, seront concernées les grandes entreprises de l'UE déjà soumises à la NFRD, répondant aux critères suivants : >500 salariés ou >40 millions d'euros de chiffre d'affaires net et/ou >€20M de total de bilan.
  • Pour les comptes au titre de l’exercice de 2025, seront concernées les entreprises qui ne sont pas actuellement soumises au NFRD et qui remplissent au moins deux des critères suivants : >250 salariés, >€40M de chiffre d'affaires net et >€20M de total de bilan.
  • Pour les comptes au titre de l’exercice de 2026 avec possibilité de reporter de deux ans, seront concernées les petites et moyennes entreprises cotées en bourse, à l'exception des microentreprises qui sont des entreprises avec <€700K de chiffre d'affaires net, <€250K de total de bilan et 10 salariés au cours de l'exercice.
  • Pour les comptes au titre de l’exercice de 2028, seront concernées les entreprises non européennes ayant une grande filiale établie dans l'UE ou une filiale PME cotée en bourse ayant >€150M de chiffre d'affaires net pour chacun des deux derniers exercices consécutifs ; ou ayant une succursale ayant >€40M de chiffre d'affaires net.

Le champ d'application de l'obligation d’information

L'article L. 232-6-3 du Code de commerce oblige les entreprises à publier des informations permettant de comprendre leur impact en matière de durabilité, ce qui inclut des considérations environnementales, sociales et de gouvernance d'entreprise.

Ces dispositions vont au-delà de la précédente déclaration française de performance extra-financière (DPEF). Pour adhérer au principe de la « double matérialité » énoncé dans la CSRD, les entreprises doivent garantir la fiabilité, la comparabilité et l'accessibilité des informations relatives à leur durabilité. Cela implique de prendre en compte à la fois l'impact sur l'économie, l'environnement ou la société et les répercussions financières significatives sur le développement, la performance et la position de l'entreprise.

Pour répondre à ces exigences, l’ordonnance et le décret[2] fournissent une description détaillée des informations sur la durabilité qui entrent dans le champ d'application de l’obligation de reporting :

  • Modèle commercial et stratégie : Évaluation de la résilience de l'entreprise aux risques liés à la durabilité, identification des opportunités découlant de considérations liées à la durabilité, et divulgation des plans, mesures prises ou envisagées, et projets financiers et d'investissement associés pour aligner l'entreprise sur les objectifs de l'économie durable.
  • Les parties prenantes : Explication de la manière dont le modèle commercial et la stratégie intègrent les intérêts des parties prenantes, et présentation de l'approche de l'entreprise dans la mise en œuvre de sa stratégie concernant les questions de durabilité.
  • Objectifs de durabilité assortis d'échéances : Définition claire des objectifs et des progrès accomplis pour les atteindre, y compris les objectifs de réduction des émissions pour 2030 et 2050.
  • Gouvernance d'entreprise et politique générale : Description du rôle des organes de direction s’agissant des enjeux de durabilité ; présentation des compétences et de l'expertise des membres du conseil d'administration en matière de durabilité ; description des politiques de l'entreprise en matière de durabilité.
  • Diligence raisonnable et impacts négatifs concernant les questions de durabilité : identification et atténuation des impacts négatifs potentiels ou réels sur les opérations et la chaîne de valeur de l'entreprise. Toutefois, les entreprises peuvent omettre dans leurs rapports, au cours des trois premières années, les données relatives à leurs chaînes de valeur.
  • Gestion des risques : Identification et gestion des risques associés à la durabilité et des éventuelles dépendances.

A retenir

Le CSRD marque une attente plus forte vis-à-vis des entreprises qui se traduit par une évolution significative des informations à divulguer, ainsi que du nombre d'entreprises tenues de partager (et donc de collecter) leurs données relatives au climat. Selon les seuils adoptés, environ 50 000 entreprises en Europe devront divulguer des informations sur le climat, contre environ 12 000 actuellement.


[1] Directive (UE) 2022/2464 du 14 décembre 2022 (directive CSRD), publiée au Journal officiel de l'UE le 16 décembre 2022 applicable à partir du 1er janvier 2024.

[2] Décret n° 2023-1394 du 30 décembre 2023 pris en l'application de l'ordonnance n° 2023-1142 du 6 décembre 2023 relative à la publication et à la certification d'informations en matière de durabilité et aux obligations environnementales, sociales et de gouvernement d’entreprise des sociétés commerciales.